La contribution au débat de la FSU Centre, pour l’Atelier régional intitulé « prévention du décrochage, une responsabilité à partager » :

FSU Centre, 13 septembre 2012
Atelier « prévention du décrochage, une responsabilité à partager »
Contribution au débat :

L’objectif de cette contribution est de mettre en relief ce que nous attendons de la prochaine loi d’orientation et de programmation, avec l’éclairage de la situation de l’académie d’Orléans-Tours, une académie tout à fait emblématique de l’incapacité de la loi d’orientation actuelle et des réformes qui en ont découlé, à jouer le rôle d’un véritable ascenseur social. Nous souhaitons que la loi d’orientation porte clairement cette ambition, et remette à l’ordre du jour cette mission première de l’Etat et de l’Ecole de la République : l’ambition ne doit plus être « l’égalité des chances », mais « la réussite de tous », pour que cette réussite ne soit pas réservée aux plus « méritants », en ignorant l’impact très prégnant dans notre région des inégalités territoriales et des déterminismes sociaux sur le destin de beaucoup de jeunes, et en renvoyant la responsabilité du succès ou de l’échec sur l’élève et sa famille, comme si tous étaient à égalité sur la ligne de départ .
La réponse à la question de la prévention du décrochage, elle est dans cette ambition pour tous les jeunes.
Les données académiques montrent les effets négatifs de la loi actuelle : la limitation de l’ambition pour tous les jeunes à la scolarité à 16 ans et à l’acquisition du socle commun a pour résultat un tri précoce qui fait sortir de l’école un nombre important de jeunes. Toutes les statistiques développées dans le cadre de l’atelier l’ont indiqué. Le nouveau Bac Professionnel en 3 ans génère un décrochage préoccupant, loin des objectifs de la réforme. Quant aux plateformes, elles concentrent leur travail sur le repérage, et les solutions réelles pour un retour en formation sont très faibles. Dans les années 2000, on mesurait aussi dans la région le manque d’ambition des familles les plus modestes pour leurs enfants, c’était un frein aux poursuites d’études, qu’en est-il aujourd’hui, dans un contexte économique et social encore plus difficile ? Il faudrait se pencher sur ce point. Le résultat, c’est un taux de sortie important autour du moment « charnière » de la fin du collège, notamment en direction de formations en apprentissage aux niveaux de qualifications les plus bas, alors que le Bac professionnel en 4 ans avait permis à nombre de jeunes de réussir par paliers successifs à aller du BEP au niveau IV, dans un parcours des « petits pas » qui donnait confiance aux familles et aux élèves et qui encourageait à pousser plus loin l’ambition des études. Combien de jeunes réussissent à aller d’un CAP jusqu’au Bac voire plus, par la voie de l’apprentissage ? Nous ne disposons pas de ces informations et nous les demandons. Nous pensons que l’apprentissage, toujours plus développé que dans la moyenne du pays à ce niveau, n’est pas la réponse pour ce type de public particulièrement fragile. Les lycées professionnels ont l’obligation d’accueillir tous les élèves, à la différence des CFA, avec les discriminations dans l’accès au contrat, les ruptures, les échecs. Nous demandons à disposer aussi des informations sur ce point.
La loi d’orientation doit porter une autre ambition. Nous demandons que l’objectif soit l’accès massif au Bac et au niveau IV de qualification, que le lycée soit pensé dans la continuité du collège, que les contenus et l’offre de formation soient pensés en amont avec cet objectif, dès la maternelle et tout au long du parcours allant du collège à la Terminale. Il faut mettre la barre haut pour tous, si l’on veut vraiment surmonter les retards récurrents dont cette académie est l’illustration, faire enfin
décoller de façon significative les poursuites d’études, permettre au plus grand nombre de poursuivre des études en lycée et d’y réussir. Un énorme enjeu de démocratisation.
L’Etat doit renouer avec cette mission première. La formation initiale, qui est le meilleur garant d’une insertion sociale et professionnelle réussie, est de la responsabilité de l’Etat et de l’Ecole de la République, qui seule a l’obligation d’accueillir tous les jeunes dans leur diversité.
Nous demandons que, dans la continuité du collège, la loi d’orientation valorise tout particulièrement la voie technologique et la voie professionnelle, qui doivent pouvoir redevenir des voie de réussite, des leviers de démocratisation, à condition qu’elles disposent des moyens pour mettre en valeur ce qui fait leur spécificité : des modalités de construction des apprentissages et d’acquisition des savoirs qui sont des facteurs de réussite pour des jeunes qui y trouveront de la motivation et le sens des études.
Nous demandons aussi que l’orientation scolaire soit une priorité, elle doit être aussi un levier contre les inégalités pour aider tous les jeunes à construire leur parcours de réussite et à dépasser toute une série de déterminismes sociaux et familiaux. La spécificité d’une orientation en direction d’un public d’adolescents en construction doit être absolument valorisée, c’est une compétence de l’Etat. C’est indispensable pour encourager les jeunes de l’académie à pousser plus loin leurs études et leur donner confiance. Pour le présent, il convient de souligner que les dispositifs mis en avant par la Région, comme « assure ta rentrée », pour les élèves sans solution, sont d’abord le fruit du travail, dans des conditions de plus en plus difficiles, des personnels de l’Education Nationale, établissements, CIO et MGI.
Enfin, nous demandons que, dans le cadre de la future loi d’orientation, la formation initiale soit d’abord pensée comme la formation nécessaire au futur adulte et citoyen, une formation générale avec une spécialisation progressive au niveau du lycée, le droit à l’erreur, les passerelles, tous les dispositifs pouvant tirer vers le haut chaque jeune de l’école au lycée. De quoi l’armer aussi pour une bonne insertion dans l’emploi. Nous refusons ce qui est trop souvent présenté dans cette région comme une évidence qui ne devrait pas faire débat, à savoir une conception réductrice de la formation initiale, qui serait pensée en adéquation avec les besoins en emplois dans les territoires, et qui , dans cette optique, pourrait justifier que l’Etat se dessaisisse de certaines de ses missions, notamment la formation professionnelle initiale et l’orientation. Les inégalités entre les régions et les inégalités territoriales à l’intérieur de notre région, montrent que ce n’est pas la réponse. En tout état de cause, nous estimons que le débat doit avoir lieu sur des bases objectives, à savoir à partir d’un bilan de la décentralisation dans les régions. Une demande que nous avons faite au président de la région et membre du comité de pilotage national, mais il n’a pas répondu à notre courrier.
Le thème de l’atelier parle de « responsabilité partagée » : nous terminerons en demandant que la loi d’orientation valorise la complémentarité des missions des différentes catégories de personnels de l’Education, qui tous contribuent à la réussite des élèves. Les personnels doivent bénéficier des moyens nécessaires à cette fin (en nombre, formation, conditions d’emploi et d’exercice des métiers, possibilité de travail en équipe, etc.)